Scène dixième, FIRMAMENT
La nuit est calme et fraîche. Au loin, un assortiment confus de cris d’animaux se mêle à des vibrations graves dont la provenance est incertaine et la symphonie qui en résulte voyage timidement sur les ailes du vent jusqu’à la terrasse de la maison où Jeanne et Sophie, assises en tailleur, contemplent l’étendue du ciel d’un œil attentif. L’absence de lumière dans la maison impose un silence religieux autour de nos deux observatrices avant que Jeanne n’élance un doigt vers l’infinie noirceur et prenne la parole.
Jeanne – Vois-tu cette étoile qui brille davantage que ses voisines ? On l’appelle l’Étoile du Berger car elle fut longtemps un phare pour ceux qui naviguaient dans les ténèbres. Je crois que c’est en fait une planète mais l’Homme n’a pendant longtemps disposé que de ses yeux et de son imagination pour concevoir son monde. Autrefois, ce grand tableau constellé était un sanctuaire accueillant les âmes défuntes et chaque astre brûlait à la gloire de quelque soldat ou de quelque poète. Aussi, la nuit offrait à la vue des rêveurs un aperçu de la profondeur du royaume supérieur qui les séparait du trône éternel. Sais-tu que bien des étoiles forment des motifs auxquels les hommes ont donné des noms ? Vois-tu quoi que ce soit qui te rappelle un animal, un personnage ou bien quelqu’un ?
Sophie secoue la tête sans trop de conviction et le silence reprend sa place pour quelques temps.
Jeanne, d’une voix effacée – À vrai dire, j’ai bien du mal à y voir quoi que ce soit de terrestre…